Convoyage Brise de mer31 de St Barth à Porto

Récit de navigation transatlantique d'un voilier Brise de mer31 de St Barth à Porto du mardi 27 juin au lundi 21 août 2023. 3800 milles. Escale : Ponta Delgada (île de Sao Miguel, Açores).

1/ Préparation à St Barth :

Après 5 jours agréables passés à St Martin après mon arrivée sur l'île à bord du catamaran que j'ai convoyé depuis l'Italie, j'arrive à St Barth par la navette.

C'est la 1ère fois que je viens à Gustavia, la capitale.

Le voilier Brise de mer31 au nom très poétique d'Ocean Son est amarré juste au pied de la mairie. Il s'agit d'un voilier en aluminium des années 70 de 9 mètres de long.

La visite du bateau me confirme qu'il s'agit d'un bateau très marin, un peu spartiate comme les voiliers de son époque mais il y a l'essentiel.

Je suis tout de suite conquis! Ce bateau possède une bonne énergie malgré de gros problèmes d'entretien visibles : les joints de ponts sont pourris et me font craindre un manque d'étanchéité, le joint du panneau avant est ancien....

L'histoire de ce bateau est intéressant. Le couple de propriétaire en poste à St Barth doit repartir cet automne en Bretagne. Ils possédaient déjà ce bateau il y a quelques années avec lequel il sont venus aux Antilles. Puis ils l'ont vendu à quelqu'un qui a laissé le bateau pourrir au mouillage. Ils l'ont finalement racheté et souhaite procéder à un entretien complet en Bretagne car il n'y a aucune facilité à St Barth, tout est très cher aux Antilles et de toutes façons ils n'auront pas le temps de s'en occuper avant leur mutation.

En clair cette mission consiste à sauver ce vieux bateau afin de lui permettre d'avoir une 2ème vie...

Je suis conquis par ce projet mais un peu inquiet quand même..Car vouloir redonner vie à ce voilier en Bretagne est louable, mais il y a "juste" une transat retour à faire avant ça!

Je m'active pour vérifier tout ce qui peut l'être : le moteur est très ancien mais me paraît en bonne état, l'électricité est hors d'âge, le tank à eau douce sera inutilisable tellement l'eau est infecte. Le gréement est très ancien aussi mais ça l'air d'être solide.

Le pilote automatique n'est pas dimensionné pour une navigation océanique mais heureusement il y a un régulateur d'allures.

Il y a l'essentiel pour naviguer GPS, AIS, VHF, sondeur. Et puis j'ai le plaisir de trouver un sextant. Il n'est malheureusement pas très fréquent de trouver cet instrument à bord des catamarans ou voiliers à convoyer même pour des transats...

Il y a beaucoup de pièces de rechanges et d'outils.

Les propriétaires ajoutent 120l de gasoil en bidons en plus des 30 litres contenus dans le petit réservoir. Ce sera utile compte-tenu des circonstances de navigation que j'expliquerai plus loin, mais je crains que cela ajoute beaucoup de poids à ce petit bateau.

Je décide de confirmer ce convoyage. C'est une belle navigation qui m'attend.

Celle-ci va se transformer en aventure car l'équipière qui devait venir y participer ne pourra pas venir. Nous sommes déjà le 20 juin, la saison cyclonique a déjà commencé et la température importante de l'eau fait craindre une arrivée précoce des cyclones. Il n'y a donc pas de temps à perdre.

Pour un convoyage comme celui-ci qui s'annonce rude, sur un bateau qui n'a pas le même confort que sur les bateaux de plaisance actuels et les risques dus au manque d'entretien, je suis hésitant sur le fait de chercher un nouvel équipier.

Il y a peu de place à l'intérieur car les propriétaires profitent de ce convoyage pour ramener beaucoup d'affaires à bord condamnant quasiment le poste avant. Il n'y a donc guère que les banquettes du carré pour se reposer mais il n'y a pas de toile anti-roulis à poste. Et puis un équipier signifie un ajout de poids supplémentaire : affaires, eau en bouteille supplémentaire, nourriture....alors que Ocean Son me paraît déjà bien chargé...

Devant le risque d'entrée d'eau à l'intérieur du fait des joints de pont défectueux, est-ce qu'un équipier supportera cet inconfort voir le risque que cela peut représenter en cas de mauvaise météo? Moi je suis prêt à courir ce risque mais je ne peux l'imposer à d'autres et encore moins le cacher....

donc c'est décidé, je ferai cette traversée en solitaire !

Ce sera ma 6ème transat mais ma 1ère en solitaire.

Le voilier est prêt au départ. J'embarque une bonne quantité d'eau en bonbonne pour compenser l'impossibilité d'utiliser le tank à eau. Inutile d'essayer de traiter celui-ci avec du vinaigre ou de la javel, c'est beaucoup trop infecte. Il faudra simplement changer le réservoir.

Parmi les vivres, j'embarque une bonne quantité de farine et de levure pour faire mon pain. Côté navigation je télécharge les éphémérides nautiques simplifiées qui me permettront de faire des points aux soleil et étoiles.

J'ai hâte de débuter et pourtant il faut attendre...deux cyclones sont annoncés. Ce sont les 1ers de la saison et il faut les laisser passer. Aucun n'arrivera à St Barth.

En attendant j'essai de visiter l'île. Malheureusement je trouve St Barth très décevant. Il y a des grosses villas partout. Je suis éberlué par le nombre de voitures qui circulent sur le peu de réseau routier! Et encore nous ne sommes pas en période touristique. Se balader à pied est très dangereux ! À Gustavia même la circulation est infernale. Tout est très cher et je ne vois pas de commerce authentique. Tout est fait pour les touristes aisés.

Ce qui me choque le plus, c'est que je ne vois pas beaucoup d'autochtone! Où sont-ils ?
St Barth est une île totalement superficielle, comme c'est triste ! Les mouillages de l'île sont envahis également..

Je profite quand même de mon passage à St Barth pour faire un pélerinage sur la tombe de Johnny, et puis j'envisage un départ mardi 27 juin.

Le 1er cyclone est passé sur la Guadeloupe et le 2ème remonte vers les Bermudes...il valait mieux attendre sinon j'aurai été sur sa trajectoire.

J'en profite pour faire une sortie d'essai. Tout fonctionne bien pour l'instant.